Projetez votre Cœur plutôt que votre Épée
cette injonction du Grand Maître japonais Moriheï Ueshiba, fondateur de l'Aïkido, est d'une actualité incontestable pour les hommes du monde entier; il est urgent de la méditer alors que partout autour de nous, la violence étend ses ravages. Elle oppose sauvagement des peuples, des ethnies, des religions, des nations. Après les horreurs de deux conflits mondiaux et les atrocités d'Hiroshima et de Nagasaki, des guerres s'allument, se propagent, et n'en finissent pas de tuer, de mutiler des enfants, de déchirer des familles, de massacrer sans raison, de détruire et de saccager. Le pire est que la violence pénètre et s'exerce jusque dans les écoles : des enfants tuent et blessent, pour rien, professeurs, surveillants ou même camarades.
Une autre violence plus voilée, qui agit, sournoisement, sous le couvert de nécessités factices s'installe au cœur des rapports entre agents de l'économie. L'obligation d'être compétitif, les impératifs inhumains de la concurrence, du rendement et de la rentabilité font naître, développent et font durer des conflits, dont les conséquences, peut-être moins visibles, n'en sont pas moins cruelles pour les particuliers. Et sans parler des hommes et des femmes que les prétendras impératifs économiques réduisent au chômage ; nos hôpitaux et nos maisons de retraite sont remplis d'êtres qu'un travail devenu inhumain a littéralement anéantis. Pour les mêmes raisons de profit, les producteurs, les convoyeurs et les distributeurs de drogues s'acharnent sans le moindre scrupule sur des êtres humains en détresse. Toujours pour des raisons d'argent, la violence s'étale sur nos écrans, petits et grands, instille insidieusement, surtout dans les esprits les plus faibles son poison mortel, dont on constate les effets; dans nos villes : voitures volées et incendiées, vols à la tire, cambriolages, hold-up, dégradations de toutes sortes contre le matériel public : téléphones publics saccagés, banquettes de métro lacérées, murs souillés, véhicules maculés, etc. Encore dans l'esprit de gain, la publicité, qui envahit chaque jour nos boîtes à lettres nous agresse sans répit de ses mensonges et de ses pièges. De toutes parts, sur tous les plans, nous sommes agressés.
Mais nous-mêmes, ne sommes-nous pas agresseurs ? Dans les moments d'agacement, d'irritation, de colère, ne nous arrive-t-il pas parfois d'injurier les autres, de leur crier des paroles blessantes ? Ne sommes-nous pas parfois entraînés à des gestes de brutalité, d'insulte; d'autant moins excusables quand ils frappent des enfants, ou des plus faibles.
Dans tous ces cas, c'est la violence qui l'emporte, et comme toute peste, elle est extrêmement contagieuse : la violence engendre la violence. Dans ce monde que dominent l'argent, le plaisir égoïste, la soif de pouvoir et d'avoir, dans cet univers dont l'homme abandonne progressivement les commandes à des machines, quand un petit nombre s'enrichit en paupérisant la grande majorité des humains, il est temps que les hommes se dressent pour dire « non, c'est assez ».
Il faut en finir avec ce matérialisme sauvage, rendre au monde un peu de conscience, d'esprit et d'amour. Il faut déposer l’Épée et agir avec son Cœur, abandonner la violence, pour pratiquer la tolérance, réprouver l'agression et enseigner la compassion.
Bref, nous avons besoin d'un supplément d'âme. Projetez votre cœur plutôt que votre épée !
Il est surprenant que ce soit justement le Fondateur de l'Aïkido, le Maître Japonais Moriheï Ueshiba, qui ait lancé aux hommes du monde entier ce cri du cœur. Il semble qu'à l'époque actuelle, la pratique de certains arts, dits « martiaux », bien loin de canaliser la violence, ne fait que la développer, en donnant à leurs adeptes les moyens de l'exercer, sans se préoccuper le moins du monde de leur fournir en même temps, et même auparavant comme il le faudrait, les moyens de la contrôler.
Maître Ueshiba a toujours déploré que dans le monde, les disciplines de combat soient devenues des sports de compétition. Gagner à tout prix, telle est l'ambition de certains pratiquants ; et ils y sont encouragés par ceux qui, sans réfléchir, présentent la volonté de vaincre comme une vertu, et font mérite au seul vainqueur des efforts du combat.
Contrairement à l'opinion courante, les arts martiaux ne sont pas des sports de violence. Quand il est autre chose qu'une simple formalité sans signification, le geste par lequel, avant et après l'exercice, les partenaires se saluent réciproquement exprime vraiment le respect mutuel de deux égaux dont chacun rend hommage à la valeur de son partenaire. Ce geste prouve bien qu'il ne s'agit pas de l'empoignade brutale de deux adversaires, mais d'un exercice commun, dans lequel l'un apprend à l'autre et par l'autre la pratique de la non-violence.
Les arts martiaux correctement pratiqués proposent des exercices de défense, et, plus précisément, ils visent à enseigner l'art de dissuader un adversaire potentiel et, si besoin est, de le neutraliser, de l'immobiliser sans le blesser. Les arts martiaux possèdent des techniques qu'il faut maîtriser grâce à des exercices quotidiens, à une pratique persévérante.
Mais cette maîtrise de, la technique n'est qu'un indispensable préliminaire. L'essentiel de l'art, que ce soit en Judo, Karaté, Aïkido, Kendo et d'autres se situe dans le cœur-esprit. C'est une mentalité qu'il s'agit d'acquérir, une manière de considérer, de sentir et de guider d'abord son partenaire sur le tatami, mais aussi un adversaire éventuel dans la vie de tous les jours.
Certes, il est relativement facile de respecter son partenaire, quand celui-ci est un ami avec lequel on s'entend bien, et avec lequel on partage le même plaisir de s'exercer; mais quand la situation change et qu'il se trouve brusquement agressé par quelqu'un qui visiblement ne lui veut pas de bien, le véritable pratiquant de l'art martial doit, comme sur, le tatami, garder la parfaite maîtrise de lui-même, considérer son adversaire avec le même respect qu'il témoignait à son partenaire et le conduire calmement à reconnaître l'impuissance de sa violence face à la force de la non-violence.
Ce n'est évidemment pas du jour au lendemain qu'on devient capable d'un tel self-control, mais c'est pourtant le but des exercices, et la seule attitude acceptable pour un véritable adepte de l'art martial. Les techniques de tous les arts martiaux, correctement pratiquées, peuvent et doivent amener les pratiquants à ce degré de domination sur soi, qui est le seul remède à la violence, la seule voie pour la désamorcer. Pour atteindre ce résultat, il faut d'abord, comme on l'a dit, une maîtrise suffisante de la technique, mais celle-ci acquise, c'est le mental qu'il faut former. Pour bien comprendre l'intérêt de cette « conversion du regard intérieur» de ce changement de mentalité, de cette manière différente de regarder le monde et les êtres, voyons ce qui est la source de toits les arts martiaux, cette énergie considérable que les pratiquants appellent le « ki », celle-là même de qui hait tout ce qui a existé, existe, existera.
C'est le « ki » qui est à l'origine de la montée (le la sève dans les plantes et dans toits les arbres de la terre, qui va faire éclore des milliards de feuilles d'une beauté et d'une diversité incroyables; c'est le « ki » qui agite les grandes marées, qui projette avec une force inouïe des montagnes d'eau contre les rochers ou les -digues du rivage, c'est le « ki » qui dans l'univers qui nous entoure règle le ballet prodigieux des milliards de galaxies qui tourbillonnent à des vitesses insensées. Eh bien, cette force immense, elle est au cœur de chacun d'entre nous. C'est pourquoi, dans la mesure où il est conscient (le la présence d'une telle force au centre de lui-même, l'adepte de tout art martial est capable d'affronter toute violence extérieure en toute sérénité.
Pour conclure, la violence qui menace nos sociétés, comme elle agresse les individus, a sans doute des causes multiples, que doivent analyser ceux qui sont en charge d'organiser la cité : architectes, édiles municipaux, sociologues. Mais il semble bien qu'à la racine de cette violence, il y ait une effroyable carence d'éducation, tant de la part de la famille que des « éducateurs ». Éduquer, c'est étymologiquement retirer, faire sortir, de l'être humain tout ce qu'il reste en lui de primitif et de bestial, pour en faire un homme civilisé, un citoyen. Une véritable éducation comporte nécessairement une certaine discipline, une certaine contrainte, pour dompter et canaliser les forces instinctives et brutales qui, dans tout homme sont les traces de ses origines animales.
Parmi les multiples facteurs qui entrent normalement en jeu dans l'éducation d'un enfant, les arts martiaux ont l'avantage de joindre l'utile à l'agréable et d'exercer un attrait particulier auprès des jeunes, parce qu'ils allient le jeu à l'exercice, le plaisir à l'effort. Ils tiennent assurément une place privilégiée comme moyen d'éducation et cela en raison même de ce que nous avons dit plus haut. Si les arts martiaux sont tellement encouragés au Japon, c'est que les dirigeants ont parfaitement compris là-bas le rapport direct qui existe entre l'activité physique et le plaisir musculaire qu'elle procure d'une part, et d'autre part l'efficacité, immédiate de son utilisation pour la cause sacrée de la Défense et de la Sécurité nationales. Cet aspect trop final perçu en Occident, mérite réflexion.
Si nous voulons enrayer la montée de la violence, si nous voulons l'éradiquer (le notre société, afin de laisser place à la convivialité, à la tolérance, à l'amitié, si nous voulons apporter un peu de chaleur dans les relations humaines, il faut rendre évidente l'urgence d'une éducation de et, entre autres, faire valoir la pertinence de la pratique contrôlée des arts martiaux,
comme l'un des moyens les mieux adaptés lutter contre la violence (les hommes et
des citoyens responsables dont la simple entraîne les jeunes au respect
des valeurs humaines de tolérance et de non-violence, qualités essentielles
pour faire accéder les jeunes à un degré d’humanité tel que l'on puisse dire d'eux :
"Ils n'ont pas besoin d'exhorter, ils n'ont qu'à exister; leur existence est un appel.
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